Page 5 - Soleil Lapon
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Celle du photographe… Son art ne fige pas un instant de grâce pour le rendre permanent :
il en capture un mouvement pour que, devant le cliché, on se figure l’avant et l’après.
Il l’interprète, et se bat avec l’aurore pour en saisir un moment fugitif, pour en extraire
des contrastes cachés, pour la contextualiser dans le silence, le froid, la nature blanche,
la ville au loin, la route ou le port, les étoiles piquetées ou les bandes de nuages.
Le photographe interprète l’aurore à sa façon.
L’approche de la plasticienne est autre encore. Elle se moule dans l’histoire,
la grande et la petite, celle des pays du nord et celle de ses habitants, elle se figure
leurs terreurs, leurs joies, leurs difficultés, leurs croyances. Elle les vit, les ingère,
et nous les restitue. Alors l’aurore prend un autre sens, profondément ancré en nous
et le lien au cosmos se fait plus intime. L’aurore dans le crible de l’art plastique,
nous restitue nos croyances ou celles des autres, et à travers cette nouvelle interprétation,
nous parle de l’humain.
Ces approches ne se nourrissent pas mutuellement : mes équations ne changeront pas
par la magie d’un cliché ou d’un tambour Sami. Il en va de même pour mes compagnons,
Gilles Galoyer et Caroline Lebrun, qui nous invitent à leur voyage autour de ce « Soleil Lapon » :
l’astrophysique ne modifie pas leurs travaux. Non !
Ces approches se complètent, simplement, et permettent, devant la multiplicité
des interprétations de l’aurore, une émotion décuplée.
JEAN LILENSTEN
Editor in Chief of the Journal of Space Weather and Space Climate (JSWSC)
Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG)
UMR 5274 CNRS / UGA
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